Henri Fontaine , Verlaine et Rimbaud
l 'Andalouse
Avez-vous dans Barcelone,
Une Andalouse au sein bruni?
Pâle comme un beau soir d'automne
C'est une maîtresse ,une lionne!
La marquesa d'Amaequi!
Jai fait bien des chansons pour elle
Je me suis battu bien souvent
Bien souvent j'ai fait sentinelle,
Pour voir le coin de sa prunelle,
Quand son rideau tremblait au vent
Elle est à moi, moi seul au monde.
Ses grands sourcils noirs sont à moi,
Son corps souple et sa jambe ronde,
Sa chevelure qui l'innonde,
Plus longue qu'un manteau de Roi!
C'est à moi son beau col qui penche
Quand elle dort dans son boudoir,
Et sa brasquina sur sa hanche,
Son bras dans sa mitaine blanche,
Son pied dans son brodequin noir!
Vrai Dieu!Lorsque son oil pétille
Sous la frange de ses reseaux,
Rien que pour toucher sa mantille,
De part tous les paints de Castille,
On se ferait rompre les os.
Quelle est superbe en son désordre,
Quand elle tombe les seins nus,
Qu'on la voit ,béante se tordre
Dans un baiser de rage et mordre
En criant des mots inconnus!
Et qu'elle folle dans sa joie,
Lorsqu'elle chante le matin,
Lorsqu'en tirant son bas de soie,
Elle fait,sur son flanc qui ploie,
Craquer son corset de satin.
Allons mon page en embuscades!
Allons!la belle nuit d'été!
Je veux ce soir des sérénades
A faire damner les alcades
De Tolose au Guadalété.
Alfred de Musset (1840-1857)Recueil:premieres poesies