Poignard :Musée des arts anciens
En arrivant au Palais du Dey,l'agitation était grande .Je trouvais Hassan Pacha dans un bien triste état.J'entendis sa voix,affaiblie mais coléreuse qui donne ordre de me faire entrer.Qu'il puisse encore avoir la force de céder à ses fureurs me rassura.Mais en le voyant ,je compris que c'était bien plutôt l'urgence qui lui donna ce sursaut.Il fallut qu'il me voie et vite.
J'ai eu des illusions dans ma vie.Je n'étais pas le meilleur , trop coléreux et parfois brutal;je reconnais tout cela.Mais je n'ai jamais cessé de penser à ce pays,l'Algérie.De vouloir le preserver des menaces et des invasions.La Regence pouvait tenir.Là où avait su peu à peu conclure avec la Sublime Porte ces arrangements qui lui confèrent aujourd'hui une large independance,elle avait la capacité de s'émanciper et de donner à notre pays sa véritable identité?Pourquoi ne pas y croire?...Je rêvais d'y croire...Ce qui me ronge aujourd'hui,bien plus que cette vilaine infection,c'est que je ne serai pas parvenu à enrayer le mal.Au contraire,on dira plus tard que sous mon règne tout s'est délité.Le vers est dans le fruit qui va pourrir et tomber.Et pourquoi?Les relations ne reposent que sur deux hommes :le consul de France et le Dey...Il ne tient qu' à eux ,de leurs affinités ou de leurs preventions,de faire ou de defaire la paix...Rappele-toi,jusqu'en 95 ,Vallière...Je peux dire que j'ai été son ami et il peut dire qu'il a été le mien.Nous avons chacun la confiance de l'autre.C'était un homme fin et sensible.Généreux .Il n'y en a pour preuve que la façon dont il prit fait et cause pour son beau-frère...
Rappeler de Valière lui faisait du bien.La douleur semblait le laisser en paix.Il respirait mieux.Je pensais alors que l'on avait exagéré,qu'avec une pareille lucidité et son habituelle determination,il était capable de combattre le mal et de guérir...Il poursuivait son évocation des drnières années,m'instruisait de faits dont je n'avais pas eu toujours connaissance.Que voulait-il me confier?J'écoutai s ces confidences sans bien comprendre pourquoi il s'en ouvrait à moi.
-Lorsque le beauf-rère de Vallière , ce Meifrund , condamné à mort par la France pour de sombres affaires à Toulon sous l'occupation anglaise,débarque en Alger,je l'ai , à la demande du consul,installé et demandé sa grâce,soutenant ses démarches...C'était pour moi la juste compensation, la seule que je réclamais en échange des prêts importants que j'avais consentis à la République française.Je n'ai jamais négligé l'amitié de Vallière;me ralliant à ses thèses,j'ai soutenu la France contre les Anglais...Mais vois-tu,c'était peut-être le début .Parce que dans cette histoire,l'amaitié entre Vallière etmoi s'est émoussée...A quoi bon?Personne ne comprenait mon geste!Pas même Vallière!Si bien que je n'obtenais rien...Ulcéré et, c'est vrai,dans un coup de colère,j'ai interdit les échanges commerciaux avec l'Agence d'Afrique.Alors le consul voulut m'amadouer et "m'acheter"pour me faire revenir sur ma decision...en voulant m'offrir quelques colifichets...Quelle bassesse et quelle trahison!-Excellence , sans vouloir vous contrarier, pour avoir vu le solitaire et la paire de pistolets , des pieces magnifiques , je vous trouve un peu injuste...tout au moins , peu objectif...